L’église de Genouillé serait bâtie à l’emplacement d’une chapelle élevée à la demande de Charlemagne, revenant de battre les Sarrazins et se dirigeant vers Charroux …alors que sa mule fit jaillir la fontaine… pour laisser couler le Pas de la mule…
Genouillé, commune du canton de Charroux, dans le département de la Vienne est mentionnée dès 1096 comme appartenant à l’abbaye de Charroux.
Le nom de Genouillé peut être plus ancien et provenir du nom d’un occupant romain Gennulius. La présence de bifaces paléolithiques atteste de l’occupation humaine depuis une période bien plus éloignée.
L’église a subi de nombreuses transformations avant de se présenter telle qu’elle est à ce jour.
L’église de Genouillé mesure :
27,40 m de long
7 m de large
En forme de croix, l’abside est droite avec 2 fenêtres latérales. La nef a été rehaussée en 1886 et le clocher
octogonal s’élève au centre de la croix.
Diverses modifications et travaux ont été menés principalement au cours des 3 siècles derniers.
Une façade remarquable
Toute la décoration de l’église est rassemblée sur la façade.
Le pignon est séparé à la base par une corniche soutenue par des modillons représentant de la droite
vers la gauche, une femme, un lièvre, des disques portant une croix signifiant le pain eucharistique, une
croix des animaux, le personnage à l’extrême gauche semble couronné et sa tête est complètement
penchée, comme s’il voulait regarder le centre de la façade.
La partie basse de la façade, le portail avec à sa droite et à sa gauche un petit tympan orné d’une
chimère.
Le portail est formé de trois archivoltes richement ornées de sculptures symboliques reposant sur des
colonnes rondes. A la hauteur de la base des arcatures, la façade est parcourue par un bandeau de
feuillage qui court également au-dessus des chapiteaux en formant le tailloir.
L’ensemble des sculptures des archivoltes se présente en bas-relief, les motifs sont incrustés dans la
pierre, le relief est en creux.
L’archivolte supérieure emprunte sa décoration au monde végétal, elle se compose d’une suite de
rinceaux et de palmettes.
L’archivolte médiane présente des personnages, de la gauche vers la droite, nous voyons : Moïse, un
ange, un acolyte, sur le claveau central un Christ bénissant, un ange présentant un livre, un ange
thuriféraire, Elie. Remarquons que tous les pieds de ces personnages reposent sur de petits socles en
forme d’esse.
Les principaux aménagements au cours des siècles passés…
1785- 1786 : Rénovations dues au Curé Pierre-Charles Picard
Construction du clocher octogonal couvert en bardeaux de châtaignier
Installation du nouvel autel
Fermeture de la fenêtre centrale et transformation en niche pour installation de la vierge
à l’enfant en bois polychrome
Ouverture des 2 vitraux du chœur
Achats de livres sacrés et instruments du culte
1882 à 1889 : travaux sur la charpente et la nef
Rehaussement de la nef
Agrandissement des fenêtres de la nef
Remplacement de la voute en bois par une voute en briques
Création de la fenêtre de la façade avec son vitrail représentant la mule de Charlemagne
qui gratte le sol pour faire jaillir l’eau de la source…
1914 : couverture du clocher refaite en ardoises d’Angers.
1943-1946 : restauration de la couverture du clocher et couverture du chœur en ardoises.
1969 – 1970 : travaux de décapage et jointoiement des parements intérieurs du chœur.
1982 : remplacement du portail d’entrée du 18ème siècle par une porte neuve en chêne.
2009-2010 : Restauration intérieure et percement d’une porte
Les travaux ont consisté en :
Décrépissage de l’ensemble des murs, remplacement des enduits par un enduit à la
chaux recouvert d’un badigeon : mise à jour de sculptures de remploi.
Création d’une porte dans le transept Sud avec encadrement et linteau en pierres avec
plan incliné extérieur permettant l’accès aux personnes à mobilité réduite.
Installation d’un chauffage et d’une sonorisation
Parallèlement, la communauté paroissiale a assuré la restauration des statues en plâtre
et des stations du chemin de croix.
Mise en place d’un badigeon sur les murs et la voute (sauf la coupole !)
Les travaux menés et financés par la commune de Genouillé ont débuté par le décrépissage de l’intérieur
de l’église et ont permis la découverte de 38 sculptures ayant été réemployées dans le mur sud de la nef
–voir photos ci-dessous.
Les travaux ont été précédés par une étude préalable des travaux de restauration menée en 2005.
Menés en 2009 et 2010, les travaux ont porté sur l’ensemble de l’intérieur de l’église, MURS et
VOUTE.
LA DECOUVERTE DE 38 SCULPTURES DANS LE MUR DE LA NEF SUD
Les sculptures découvertes au cours des travaux avaient été réutilisées dans le mur sud de la nef.
Elles sont de la même facture que celle en place dans le portail ouest et présentent de nombreuses
similitudes avec les sculptures en place. Ces différentes sculptures peuvent provenir d’un ensemble
correspondant au portail ouest –arcade transformée au cours des remaniements précédents- ou
bien encore d’une porte aujourd’hui comblée. En effet, au moment des travaux, deux arcs comblés
ont été également mis au jour dans le mur sud de la nef dans la partie la plus à l’ouest…
Selon l’étude menée par la DRAC Poitou-Charentes, il est possible de les dater d’environ 1130 -1er
tiers du XIIème siècle
Nous avons donc découverts plusieurs sculptures dont des :
• Claveaux d’arc avec tête de profil
• Claveaux d’arc avec rinceau en palmettes
• Claveaux d’arc avec fragment de corps
• Parties inférieures de colonne
• Chapiteau d’angle
• Eléments d’archivolte
La richesse du style des visages ou bien des motifs végétaux dans la plupart des sculptures découvertes ont
incité la commune de Genouillé à envisager la restauration d’une douzaine de ces sculptures en accord
avec la DRAC. N’ayant pas été en contact avec l’air ou l’humidité, les éléments retrouvés n’ont pas été
altérés par le temps. Il semble possible de rapprocher les éléments découverts à Genouillé de ceux
présents à l’église de Champagne-Mouton.
Des têtes sculptées d’une qualité esthétique exceptionnelle
Plusieurs des motifs végétaux découverts – environ 20 claveaux –
rappellent les motifs végétaux présents dans le portail ouest.
Chapiteau à tête humaine avec moustache très fine et dont la tête
rassemble deux corps d’animaux dont la longue queue remonte entre l’arrière-train et ensuite sur
le flanc pour se terminer au-dessus du dos.
Claveaux avec des parties de corps dont 2 claveaux présentent un
personnage en totale nudité exhibant son pénis tout naturellement !!!
Plusieurs visages très esthétiques avec des yeux très expressifs en
forme d’amande et des chevelures aux plis parallèles et très présentes. Ces visages rappellent les
sculptures du portail. Deux des visages se font face à face et semblent tenir, l’un des jambes, pour
l’autre les pieds. Difficile interprétation pour 2 claveaux qui semblent se compléter.
En fait, on retrouve, à la fois les mêmes motifs végétaux sur la façade ;
de même, on retrouve également une tête de chapiteau avec un visage unique avec deux corps
d’animaux.
Les éléments trouvés ont fait l’objet d’une INSCRIPTION A L’INVENTAIRE SUPPLEMENTAIRE des
Monuments historiques Objets mobiliers le 13 décembre 2010 puis du CLASSEMENT par la
commission nationale du Ministère de la culture le 16 juin 2011.
Le nombre important de claveaux aves des motifs végétaux et surtout l’impossibilité de les
assembler montre, à l’évidence, que tous ces fragments étaient insérés dans un ensemble plus
important – portail ou baie. Il est regrettable que les travaux menés n’aient pas fait l’objet d’une
recherche archéologique digne de la qualité des éléments découverts. Une seconde phase de
restauration de l’église va être consacrée à la restauration extérieure. Il est fort probable que de
nouveaux éléments seront découverts et nous permettront de mieux comprendre cette
découverte…
Jean-Guy VALETTE
Décembre 2011